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Archives : éditoriaux 9 septembre 1943. L’insurrection libératrice

10 septembre 2018
Pas facile d’imaginer l’atmosphère qui régnait en ce jour de septembre à Ajaccio : la délivrance, la liberté, la liesse. L’occupant italien arrogant est vaincu, humilié. Ajaccio libéré mais pas la Corse. Il faudra presque un mois de durs combats contre les Allemands qui eux n’ont pas rendu les armes. André Vesperini a relaté tout cela dans son discours prononcé pour la cérémonie commémorative du 75ème anniversaire. A l’issue de la cérémonie, lors de la réception à la mairie d4ajaccio, acques Vergellati, directeur du service départemental de l’ONACVG de la Corse-du-Sud, a remis à Laurent Marcangeli, maire de la ville d’Ajaccio, l’affiche officielle du 75ème anniversaire de la Libération de la Corse.

 

« Le 9 septembre 1943, c’est l’aube qui chasse les ténèbres de la nuit noire dans laquelle la Corse vit  depuis 11 mois d’occupation fasciste ». Ainsi s’exprimait Jérôme Santarelli Président de notre association en ce même lieu il y a 14 ans. C’est bien un évènement majeur que celui de la libération de la Corse que nous commémorons aujourd’hui, 75 ans après ce 9 septembre 1943, jour où l’appel à l’insurrection est lancé par le Comite Départemental du Front National de la Résistance. Ce jour là, juché sur le toit d’une ambulance Maurice Choury et quelques-uns de ses compagnons d’armes proclamait le ralliement de la Corse à la France libre. Il engageait nos compatriotes à chasser l’ennemi du sol national, à éliminer le régime de Vichy et à restaurer la légalité républicaine.
Certes, le 9 septembre reste la date emblématique du soulèvement populaire, mais c’était un aboutissement : la Résistance venait de loin. En effet, le 4 décembre 1938, après que le Conseil fasciste ait proclamé sa  prétention d’annexer la Corse, des milliers de femmes et d’hommes se rassemblaient pour faire serment, connu aujourd’hui comme le serment de Bastia : «Sur nos berceaux et sur nos tombes nous jurons de vivre et de mourir Français », serment qui constitue le fondement de l’esprit de résistance des Corses.

Il est vrai que l’unité des forces résistantes insulaires ne s’est réalisée qu’après plusieurs tentatives infructueuses… C’est le 19 mars 1943 après la mort héroïque de Fred Scamaroni que le Front National devient le réceptacle de la quasi-totalité des organisations de résistances existantes, et partant, l’interlocuteur d’Alger. Femmes et hommes s’y sont rassemblés dans une grande diversité de convictions politiques, religieuses et philosophiques. Ce que le général Jacques Chaban-Delmas, le président d’honneur de l’ANACR avait résumé dans cette formule : « tout nous divisait sauf l’essentiel ».

L’essentiel ?
Chasser l’ennemi du sol, éliminer le régime de Vichy, rendre la parole au peuple, fidélité au serment de Bastia. Tout cela est résumé dans le mot d’ordre « Pour une Corse libre, républicaine et française » Ce 9 septembre 1943, voici enfin venue l’heure d’en finir avec 11 mois d’humiliation, d’oppression, de spoliation ; l’heure de laver l’affront de ce 11 novembre quand s’installèrent, en vainqueurs dans l’île, 80.000 soldats italiens suivis l’été 43  dans l’île de quelques 5.000 soldats d’Hitler. Jamais, aucun ennemi n’avait foulé le sol de Corse depuis un siècle et demi que la Corse avait été coparticipante de la Révolution et adhéré  à ses valeurs proclamées : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Cette révolution dont Pétain maugréait son aversion dans cette formule : « 150 années d’erreurs », et dont Goebbels avait promis qu’elle serait « rayée de l’histoire », non sans écho parmi des sympathisants irrédentistes en Corse.

C’est une foule en liesse qui reçoit ce matin du 9 septembre l’annonce par les membres du comité départemental du ralliement de la Corse à la France libre ! Ajaccio sera la première ville française libérée ! Alors même qu’une insurrection n’entrait pas dans la stratégie de la France libre du gouvernement d’Alger ni des Allies, les patriotes corses se soulèvent pour chasser l’ennemi Hitlérien de leur sol. L’insurrection et les combats victorieux du 9 septembre au 4 octobre allaient offrir aux forces alliées non seulement des hommes de 22 classes d’âge qui s’engagèrent dans l’armée de libération mais aussi un formidable porte avions, USS CORSICA, qui mettait l’Italie à portée d’aile de leur aviation.

Notre hommage va aussi aux forces françaises venues d’Afrique du nord prêter main forte aux patriotes corse pour libérer notre ile ; dans la nuit du 12 au 13 septembre, 109 soldats du premier bataillon de choc entassés dans le sous-marin Casabianca sous les ordres de l’héroïque équipage du commandant L’HERMINIER ; les jours suivants, c’est autour des soldats débarqués par le TERRIBLE et FANTASQUE. Plus précisément les tirailleurs marocains les spahis les goumiers. Les Français qui seront aidés par quelques unités de l’armée italienne ralliées aux forces de Libération pour chasser les Allemands, leurs alliés de la veille ; notre souvenir et notre gratitude va aussi bien sûr à celles et ceux qui ont préparé l’insurrection libératrice et contribué à sa réussite -au prix de leur vie parfois. Et nous voulons aussi associer dans cet hommage nos compatriotes qui ont combattu en d’autre contrées de France, d’Europe, d’Afrique et d’Asie.

De toute cette période il nous reste « le souvenir douloureux du pire et la mémoire fortifiante du meilleur » pour parler comme notre compatriote, le philosophe Jacques Muglioni. Pour le pire, la lâcheté, la collaboration, la délation et autres ignominies. Pour le meilleur, le courage de désobéir pour garder sa dignité et celle du pays. Et pour nous aujourd’hui un précieux héritage de valeurs et d’idéaux dont la validité ne se dément pas après plus de sept décennies. Même si ce qui est advenu après n’a pas toujours été à la hauteur des espérances de ceux qui s’engagèrent dans cette lutte contre la barbarie, la Résistance reste une référence : ce qui a été proclamé et défendu  jugeait par avance ce qu’en ferait les générations futures.

Notre jeunesse doit savoir combien la liberté, l’indépendance et la paix en Europe ne sont leur héritage aujourd’hui que parce qu’elles ont été des conquêtes hier ! Nous sommes ici aujourd’hui pour rappeler que cette belle page d’histoire a été écrite par ceux qui se sont dressés contre la barbarie et ont contribué à la vaincre. L’histoire nous donne bien plus qu’un héritage à célébrer, bien davantage qu’un patrimoine à entretenir, : leur héritage nous oblige ; pour être à la hauteur de ce passé, à la hauteur des défis d’aujourd’hui et de demain. Le combat pour la liberté et la justice doit continuer à être mené avec une grande vigilance car ces combats ne sont jamais gagnés d’avance…

Vive la Corse vive la république vive la France »

Lien : Réception à la mairie d’Ajaccio. Remise de l’affiche du 75ème anniversaire de la Libération au maire d’Ajaccio, M. MARCANGELI par Le directeur de l’ ONAC de Corse-du-Sud, M. VERGELLATI.

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