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Archives : éditoriaux CHAUBIN Hélène, La Corse à l’épreuve de la guerre 39-43

16 septembre 2012
orrespondante départementale du Comité d’Histoire de la Deuxième Guerre Mondiale, puis de l’IHTP-CNRS, Hélène Chaubin avait déjà publié en 2005 Corse des années de guerre 1939-1945 (Paris, Editions Tirésias – AERI, 140 p.), outre plusieurs contributions parues dans les Annales du Midi comme dans Etudes Corses. Elle nous livre aujourd’hui un ouvrage plus conséquent (287 p.) sur une période chronologique plus réduite (l’étude prenant fin avec le rapatriement des troupes italiennes en octobre-novembre 1943)

Ce volume de la collection Chroniques est le second qui aborde l’occupation italienne du Sud-Est (1), il est introduit et mis en perspective par une longue et riche préface problématisée rédigée par l’un des meilleurs connaisseurs de l’histoire de la Corse (Francis Pomponi) et il est étoffé par vingt Annexes variées (trois cartes, les tableaux de l’enquête du CHDGM sur la Collaboration, la reproduction de tracts diffusés par les autorités occupantes aussi bien que par les mouvements de résistance, ainsi que de rapports officiels, le texte des conventions d’armistice du 24 juin 1940 et du 3 septembre 1943, la liste des résistants insulaires tués lors des combats insurrectionnels).Le texte proprement dit s’articule en six chapitres (Une « économie rurale de guerre », En guerre avec l’Italie, La Corse maréchaliste, Dix mois d’occupation italienne, Veillée d’armes, La Libération) à la pagination très inégale (le premier comprenant dix pages alors que le troisième en possède soixante), dont les intertitres sont le plus souvent l’œuvre des Editions Vendémiaire. L’auteur témoigne de sa très bonne connaissance de l’histoire contemporaine de l’Ile de Beauté mais aussi de la société corse pour décrire avec pertinence les clivages socio-politiques et l’évolution du rapport de forces entre la « Corse maréchaliste » et la « Corse résistante ». Elle ne néglige pas les aspects socio-économiques conduisant à une aggravation de la situation alimentaire et à un isolement croissant de l’île par rapport à la métropole. Ayant pu consulter à Rome les archives des Affaires étrangères, Hélène Chaubin fait découvrir à ses lecteurs les différents plans de pénétration culturelle et/ou d’annexion, tout en retraçant bien l’activité des membres civils de la Délégation de contrôle italienne de la Corse, le plus souvent d’anciens cadres consulaires en fonction dans l’île avant-guerre et impliqués dans la mouvance fasciste-irrédentiste. Elle met en lumière l’émiettement progressif de la mouvance gaulliste et la montée en puissance de la mouvance communiste, le rejet quasi unanime de l’Occupant et de ses prétentions, évoquant avec finesse des spécificités de la situation corse (le refus des prisonniers de guerre d’accepter une libération anticipée moyennant une compromission avec l’Italie, l’absence d’aryanisation économique et de rafle des juifs étrangers en 1942 comme de départs pour le STO en 1943, l’internement d’une cinquantaine de juifs français par les autorités italiennes à Asco, la brutalité de la répression menée par l’OVRA et les carabiniers, la précocité du passage à la lutte armée, une insurrection réussie, le premier département français libéré, la contribution humaine à la libération de la métropole par la mobilisation de vingt-deux classes).Dans sa conclusion, l’auteur insiste sur l’élan unitaire insufflé par une mouvance communiste fort réduite au début des hostilités, sur la réaffirmation des liens entre la Corse et la France lors de la visite effectuée par le général de Gaulle en octobre 1943 comme sur la transformation de l’île en porte-avions fixe permettant à des centaines de bombardiers alliés d’attaquer tous les jours des objectifs situés dans la péninsule italique aussi bien que sur le sol métropolitain. Elle affirme que si l’esprit de résistance n’a pas été unanime, il l’a néanmoins emporté, ajoutant un épisode glorieux aux luttes menées depuis des siècles par les Corses pour  la défense de leurs libertés.

Jean-Louis PANICACCI (Université de Nice et Musée de la Résistance azuréenne)

[1] Panicacci Jean-Louis, En territoire occupé. Italiens et Allemands à Nice 1942-1944, février 2012, 287 p.

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