Chargement...

 

Biographies De Casalta Sébastien, dit « Claude »

24 février 2022
Sébastien de Casalta
Sébastien de Casalta

Né le 11 juillet 1908 à Bastia (Haute-Corse), et décédé le 26/10/1978 à Brignoles (Var).

Sa jeunesse.

Antoine, Sébastien, Emile, Decius, est le fils de Philippe de Casalta et de Louise Battisti. Il poursuit des études supérieures et obtient une licence en droit qui lui permet d’exercer la profession d’avocat à la Cour d’appel de Bastia (le Certificat d’aptitude à la profession d’avocat n’a été créée qu’en 1941). Dans les années trente, Il s’engage aussi en politique. Il fonde la section bastiaise des Jeunesses socialistes sachant que la SFIO est peu implantée en Corse, tout comme le parti communiste.  Le radicalisme est le courant prépondérant qui incarne pratiquement la gauche corse. Les socialistes ne peuvent avoir d’élus sans s’allier aux radicaux ; par exemple, aux législatives de 1936, la SFIO ne recueille que seulement 397 voix sur 49 237 suffrages exprimés. Il intègre dès lors une coalition et est élu conseiller municipal de la ville de Bastia en 1935. Cette entrée en politique comme élu se fait auprès du sénateur maire radical, le médecin Émile Sari qui décède deux ans plus tard, le 9 juin 1937, remplacé par son adjoint, un autre radical, l’avocat Hyacinthe de Montera. Sa situation de militant de gauche est renforcée par la victoire nationale du Front populaire aux élections législatives du 3 mai 1936 avec un programme de grandes conquêtes sociales. Toutefois cette période est de courte durée. En outre, aux frontières de la France, l’Italie est dirigée par un régime fasciste, l’Allemagne par un régime nazi et l’Espagne par un régime franquiste.

Ses débuts dans la lutte contre la menace fasciste

Le 4 décembre 1938, pour manifester leur refus des prétentions d’annexion de la Corse par Mussolini, il participe, avec l’équipe municipale, à la manifestation très populaire (20.000 personnes) du « Serment de Bastia », devant le monument aux morts. De même, le 2 janvier 1939, lors de la venue de Georges Daladier pour rassurer la population, à celle au côté du maire Hyacinthe de Montera devant une foule en liesse de 40.000 personnes sur la place St Nicolas. Toutefois après l’installation du nouveau pouvoir pétainiste à Vichy le 10 juillet 1940, le conseil municipal bastiais, dont il fait partie, est remplacé d’autorité. Hyacinthe de Montera est destitué de ses fonctions de maire du fait de ses idées radicales de gauche et de son rattachement au Général de Gaulle puis sera par la suite arrêté.
En 1941, de Casalta fait partie des premières recrues du mouvement Combat, avec les de Montera. Plusieurs réunions s’enchaînent avec le secrétaire général de mairie, Charles Clément, le Bibliothécaire, Dominique Vecchini. Pendant la période entre juin 41 et février 42 Sébastien de Casalta participe aux réunions d’échanges et de réflexions chez le fils Joseph Louis de Montera, dans son studio, avec plusieurs personnes dont Laurent Preziosi qui travaille à Bastia durant cette période pour fuir les autorités de Vichy à Alger et réfléchir aux actions de résistance possibles.

L’engagement dans l’action clandestine après l’occupation italienne

Après l’occupation italienne le 11 novembre 1942, Sébastien de Casalta participe à ses premières réunions de résistance à l’occupant mussolinien. Le 20 janvier 1943 Laurent Preziosi revient à Bastia, après avoir participé à Alger à l’action clandestine dont l’aide aux alliés le 8 novembre 1942 (Opération Torch), et retrouve Joseph Louis de Montera, fils de Hyacinthe, à son studio, ceci dans le cadre d’une mission secrète, Pearl Harbour, dans laquelle il a été intégré par les services spéciaux de la Défense Nationale. Ces services ont réussi à l’organiser sans qu’elle soit connue du Haut-Commissaire du moment l’Amiral Darlan, présent à Alger au chevet de son fils. A noter que les trois autres agents sont alors encore à Corte : Toussaint Griffi, son cousin germain Pierre Griffi et leur chef de mission Roger de Saule.

Dès cet instant, Sébastien de Casalta est associé à une réunion que Joseph de Montera décide d’effectuer chez son père avec d’autres personnes dont notamment Dominique Casanova, le professeur Roger Soulairol, l’intendant du lycée de Bastia Dominique Poli, à charge pour eux de recruter rapidement dans le plus grand secret d’autres résistants. Pour sa part, la mission Pearl Harbour est renseignée des différentes personnes à contacter pour organiser des réseaux dans différentes régions. Dans la région bastiaise, Sébastien de Casalta fait partie des responsables politiques influents et sûrs. Il crée pour Pearl Harbour un réseau de renseignement qui travaille, entre autres missions, sur les activités des Italiens dans la zone portuaire de Bastia). Il prend pour pseudonyme « Claude ».  Cependant, en février 1943, Joseph Louis de Montera avec d’autres membres du réseau bastiais et de celui de St Florent sont arrêtés et déportés dans un camp de prisonniers en Italie. Sébastien de Casalta réussi à s’échapper à temps et poursuit son action au maquis.

A partir d’avril tous les réseaux sont regroupés au sein du Front National de résistance qui devient très actif sur les différentes villes de l’Ile. Toutefois, en juin 1943, son nom apparait sur la liste des activistes opposés à l’occupation étrangère mais les Chemises noires ne parviennent pas à le retrouver. Le 16 août 1943, le Tribunal militaire italien de la VIIème armée qui siège à Bastia le juge in absentia pour complicité d’espionnage militaire en même temps que Pierre Griffi, le radio de Pearl Harbour. Les deux hommes sont condamnés à mort : de Casalta par contumace, Pierre Griffi qui avait été arrêté à Ajaccio le 9 juin est exécuté le 18 août 1943 à Bastia.

A l’annonce de la capitulation de l’Italie, le Front National décide l’insurrection armée le 8 septembre. Après moins de quatre semaines de combats, la Corse est entièrement libérée, avec l’appui de l’armée française, le 4 octobre 1943. Le 11 octobre Sébastien de Casalta intègre la délégation de la ville de Bastia (seule ville sinistrée du département), composée de quinze membres qui se rendent à Ajaccio pour être reconnue en qualité de conseil municipal bastiais par le nouveau préfet Luizet. Elle est effectivement reconnue en novembre. Il est alors membre du mouvement IV° République, que Paul Giacobbi et Henri Maillot créèrent à côté du Front national pour représenter la Résistance non communiste., il est élu conseiller municipal de Bastia.

La poursuite de son engagement politique après-guerre

Réélu conseiller municipal à l’issue des élections du 29 avril 1945, sur la liste « Union Patriotique », Sébastien de Casalta devient 1er adjoint au maire de Bastia de 1947 à 1958, faisant souvent fonction de maire. Il souhaite représenter la SFIO aux différentes élections représentatives mais sans succès ; notamment aux élections législatives de 1946, (sur une liste commune, communistes-socialistes, en rupture avec la discipline du parti et sans son investiture où seul un autre socialiste, Jacques Bianchini est élu au côté d’Arthur Giovoni, communiste), à celles de 1956, aux cantonales de 1949 à Bastia-Terravecchia, aux sénatoriales de juin 1955.

Le 25 mai 1958, il lui revient d’incarner la résistance républicaine. Il s’oppose au colonel Thomazo, arrivé dans l’île après le coup de force d’Alger du 13 mai 1958. Thomazo après avoir investi la préfecture d’Ajaccio, se présente à Bastia, soutenu par les parachutistes, comme commandant civil et militaire. Le maire Jacques Faggianelli étant à Paris, Sébastien de Casalta fait adopter une motion d’ « attachement à la République » par le conseil municipal qui se retranche dans l’Hôtel de ville, soutenu sur la place de la mairie par les opposants au coup de force d’Alger. Finalement, Sébastien de Casalta sort libre du bâtiment (ceint de l’écharpe tricolore) avec le conseil municipal.

Le surlendemain, grâce à la complicité de Raymond Lenziani1témoignage de Hubert Lenziani, fils de Raymond Lenziani, Sébastien de Casalta, en compagnie de Pierre Giudicelli (conseiller municipal communiste), part clandestinement à Paris, pour rencontrer Jules Moch, ministre de l’Intérieur. Ils déjouent la surveillance des parachutistes,  lesquels contrôlaient le port de commerce de Bastia?.  Raymond Lenziani les véhicule jusqu’à la marine de Sisco (commune du Cap Corse) pour les faire embarquer sur un chalutier à destination du continent. Pour cette résistance, Jules Moch leur décerne la Légion d’Honneur.

Après le putsch des généraux d’Alger du 22 avril 1961, il défend les mêmes valeurs en réunissant, de manière préventive, à son domicile les adversaires du putsch. Dans le cadre du « Mouvement du 29 novembre 1959 », fondé par des responsables politiques de gauche, radicaux socialistes et communistes, il consacre ses principales luttes à s’opposer, à la vie chère en Corse, à la fermeture de lignes de chemin de fer, à l’implantation de sites polluants au massif de l’Argentella, au délabrement des infrastructures de la Corse, et à exiger l’obtention d’un dispositif fiscal régional. Il combat aussi une fraude électorale grandissante notamment en 1965, favorisée par la pratique des votes par correspondance. Ce mouvement devient par la suite le ferment des luttes régionalistes. En mai 1966, il devient secrétaire de la fédération SFIO puis secrétaire général de la FGDS et secrétaire du Parti Socialiste de la Corse en 1969. Il est élu conseiller général de Muro en 1967.

Au décès de Gaulle, le 9 novembre 1970, il lui rend hommage avec les réserves suivantes : « Moi qui suis socialiste, j’ai combattu la politique de De Gaulle en raison de la manière dont il est arrivé au pouvoir et qui ne fut pas celle d’un républicain. Il ne faut pas oublier que sa politique a été celle des capitaux et qu’il a laissé un régime capitaliste. » En 1971, lors des municipales à Bastia, il ne figure pas sur la liste gagnante qui est celle de l’Union de la gauche conduite par Jean Zuccarelli, mais sur la liste battue, avec le radical Faggianelli, des socialistes et des régionalistes. Il demeure responsable de la Fédération du Parti Socialiste de Corse jusqu’en 1973. Il décède en 1978 à Brignoles dans le Var à l’âge de 70 ans.

Décorations connues : Officier de la Légion d’honneur, Médaillé militaire.

Georges Preziosi. Sources : articles de journaux, fiche biographique de Raymond Lenziani sur le site et  Première mission en Corse occupée. Laurent Preziosi et Toussaint Griffi. Ed. L’Harmattan.

Copyright ANACR 2A 2020   |   Administration