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BiographiesEvénements MERIA Jean

18 octobre 2021
Meria Jean
Meria Jean est né le 27/09/1909 à Nonza et décédé le 23/12/1987 à Bastia.
Il effectue la plus grande partie de sa carrière professionnelle aux PTT de Bastia après un concours réussi à Paris en 1933. Dès son entrée dans la fonction publique, il s’engage dans le syndicalisme et en politique, menant les luttes les plus importantes sur l’île dont celles de la Résistance où il y assume des responsabilités importantes au sein du Front National de la région bastiaise.
Le militant syndical et politique.

En 1934 il retourne en Corse où il est nommé à Bastia commis des PTT. Peu de temps après, il est élu secrétaire de la section syndicale des PTT à l’issue du congrès de réunification. Parallèlement, en octobre, il se présente pour la première fois comme candidat de la SFIO aux élections du conseil d’arrondissement dans le canton de Terra Vecchia à Bastia mais ne recueille que 39 voix. L’année suivante, il est candidat aux élections municipales de mai 1935, à Bastia, sur une liste d’union de la gauche.

1936 est une année charnière pour lui, aussi bien pour sa vie professionnelle que familiale : il est promu contrôleur des PTT et épouse, à Poggio-d’Oletta, celle qui deviendra Mme Blanche Meria. Mais 1936 c’est aussi la victoire électorale et l’accession au pouvoir du Front populaire, issu d’un accord entre le parti radical, la SFIO et PC. Lui, quitte alors la SFIO pour le PC en partie à cause de la non-intervention de la France dans la guerre d’Espagne. Durant cette période, il s’implique activement dans les comités de soutien à la jeune République espagnole. Malgré son désaccord sur la position de la SFIO, il anime néanmoins, avec l’avocat SFIO, Charles Cancellieri, différents meetings au péristyle du théâtre municipal de Bastia pour faire prendre conscience de ce drame et de ces atteintes à la démocratie. Son épouse, Blanche Méria, organise, avec notamment d’autres femmes, les comités de collecte de lait concentré et de vêtements chauds pour les républicains espagnols. Parallèlement, il poursuit ses luttes revendicatives dans son syndicat aux PPT. Aidé par des enseignants syndicalistes, il constitue aussi une bibliothèque populaire puis une école destinée à l’ enseignement des travailleurs dont beaucoup sont illettrés.

Les espoirs que suscite l’avènement du Front populaire est aussi un encouragement aux luttes revendicatives. Jean Méria, secrétaire général de l’UD-CGT, parcourt toute l’île, avec d’autres syndicalistes, pour convaincre les ouvriers de se syndiquer pour améliorer leurs conditions de travail ; ils s’adressent notamment auprès des ouvriers des usines des tannins de Folelli, Barchetta et Ponte Leccia, ou pour organiser les ouvriers agricoles, dans la « Conca d’Oro » (région de Saint-Florent, à l’ouest de Bastia).

A Bastia, il préside, le 4 avril 1937, le congrès régional constitutif de la Fédération corse du PC (rattachée jusque là à la région provençale) et y présente le rapport sur le mouvement syndical. Le 1er mai, fête du Travail, Jean Méria organise la manifestation de Bastia, qui regroupe plus de 5.000 personnes. Toutefois en avril 1938, c’est la fin de la gouvernance nationale du Front Populaire. Les mouvements nazis et fascistes se renforcent. Une nouvelle période s’amorce faite de menaces aux frontières. La propagande irrédentiste s’intensifie en Italie. Le 30 novembre, les parlementaires mussoliniens affichent clairement leurs prétentions annexionnistes. Ils scandent : « Tunisia, Savoia, Nizza, Corsica, a noi ». Dès lors, dans un sursaut patriotique, toutes les tendances politiques, syndicales ou associatives confondues se réunissent au « Café des Gourmets» à Bastia pour affirmer leur plus vive opposition au visées du Duce. Jean Méria s’implique pour représenter les syndicats. Le dimanche 4 décembre, jour fameux du « Serment de Bastia », le cortège qui traverse la ville est très important (environ 20 000 personnes sur une population bastiaise de 50 643 habitants).  Le 21 mai 1939, Jean Meria accède à des responsabilités plus importantes. Il est élu secrétaire général de l’Union départementale par les délégués de trente syndicats. A l’occasion du 150e anniversaire de la Révolution française, il initie La Corse ouvrière, organe de presse des syndicats ouvriers confédérés de la Corse : le premier numéro paraît le 14 juillet 1939.

L’ engagement tout tracé dans la résistance corse

Juin 1940, la France est vaincue par l’Allemagne nazie. Juillet 1940, Le maréchal Pétain, avec l’aval des parlementaires, liquide la République et « entre en collaboration » avec l’occupant. La zone sud de la France (2/5èmes du pays) n’est pas occupée mais le régime de Vichy y a interdit toute expression démocratique. A Bastia, le 12 février 1941, la municipalité républicaine de Hyacinthe de Montera est dissoute et remplacée par un maire nommé par Vichy, l’intendant général Gherardi. Jean Méria qui bénéficie de tout un réseau de syndicalistes, parvient à faire distribuer de journaux de la Résistance obtenus grâce à des marins qui les lui livrent dans des valises.

Le 11 novembre 1942, après le débarquement des Anglo-Américains en Afrique du nord, les troupes de Mussolini envahissent la Corse. Jean Méria entre dès lors en action en participant à l’organisation des comités populaires d’entreprise, puis progressivement à la mise sur pied du Front national. Dès décembre 42, un groupe de résistance s’organise autour de Hyacinthe de Montera mais plusieurs de ses membres sont arrêtés. A partir de mars 1943 Jean Méria est responsable des PTT dans le groupe de résistance bastiais du Front National qui se structure sous l’égide de Simon Vinciguerra (dit «Caïus») et Dominique Salini, son adjoint (dit «Brosse»). Noël Fontana, est chargé de l’organisation sur la haute ville (Terra Nova) et Charles Galetti, en bas de la ville (Terra Vecchia). Méria est ainsi un des représentants de différents métiers dans cette organisation. Il se sait surveillé par la police française, mais il continue à occuper son poste aux PTT. D’ailleurs, dans un rapport, celle-ci signale sa présence dans les manifestations du 22 et 23 mars pour « le Pain et la Liberté ». En outre, il héberge durant cette fin du mois de mars 43, Léo Micheli et Joseph Buresi, contraints de quitter les bancs du lycée et de passer dans la clandestinité. Son épouse, résistante aussi, gère cet hébergement et les contacts à établir.

Fin juillet 1943, il rencontre à Bastia un ami d’enfance, Dominique Vincetti et lui demande des armes. Elles lui sont livrées très rapidement. En effet, le sous-marin « Casabianca » débarque le 31 juillet et le 1er août 20 tonnes d’armes sur la plage de Saleccia (côte nord-ouest de l’île). A partir du dépôt de Casta, elles sont entièrement distribués dans différents secteurs du Nord de l’Ile dont la région bastiaise. Malheureusement après la livraison du stock, Dominique Vincetti y est surpris avec Charles Galetti par une colonne de carabiniers et y laissera la vie en héros le 22 août 1943.

Dès l’armistice de l’Italie, connu le 8 septembre, l’ordre d’insurrection est lancé d’Ajaccio par les chefs du Front National. L’ ensemble du Comité d’arrondissement de Bastia1Simon Vinciguerra, Dominique Salini Dominique Poli, Joseph Gambotti Pierre Simonpiétri, Pierre Innocenzi, Pierre Marie Franceschi et le jeune Léo Micheli, excepté Charles Galetti, terrassé par une fièvre, dont Jean Méria fait partie, s’empare le 9 septembre 1943 de la sous-préfecture de Bastia. Dominique Salini est chargé d’occuper aussi la mairie, le 10 septembre 1943, avec Noël Fontana et deux FFI de Vensolasca. Dominique Salini annonce à la population, du haut du balcon de l’hôtel de ville, que Bastia n’obéit plus à Vichy mais rejoint la France combattante. Le 11 septembre 1943, Jean Méria et quatorze autres patriotes constituent une délégation2Elle comprend Dominique Salini, Simon Vinciguerra Jacques Faggianelli, Sébastien de Casalta, Joseph-Louis de Montera, Dominique Poli, Charles Galetti, Mme Emmanuelli, Jean Ferracci, Jules Michelangeli, Louis Orenga,  Sghirla, l’abbé Zattara, Charles Zuccarelli qui se rend à Ajaccio pour y rencontrer le nouveau préfet venu d’ Alger, Luizet, afin qu’il reconnaisse et légitime le nouveau conseil municipal de Bastia désigné par la Résistance.

Le 4 octobre 1943, toute la Corse est libérée. Jean Méria fait partie de l’organisme dirigeant du Front national et du conseil municipal provisoire de Bastia. Aux élections du 29 avril 1945, il est élu conseiller municipal de Bastia et retrouve, en même temps, son emploi à la Poste de Bastia. Il occupe également le poste de trésorier de la fédération communiste et crée le « Cercle des Amis Républicains ». Il décède l’avant-veille de Noël 1987 dans cette ville de Bastia où il a mené ses plus grandes luttes syndicales, politiques, sociales, et de résistance.

Georges Preziosi

Sources documentaires : différents ouvrages et vidéos sur Jean Méria

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