Ses parents sont des propiétaires terriens et tiennent à Calvi un important commerce d’alimentation depuis 1919. Avant son service militaire, Dominique SPINOSI y travaille mais il devance l’appel et est incorporé au Bataillon de chasseurs à pieds d’Antibes le 21.10.1930. Son service militaire achevé, le 15.10.1931, il reprend son activité professionnelle dans le commerce de la famille. Son régiment, le 173ème R.I. , le rappelle en 1938. Il est vite remis en disponibilité, puis rappelé à nouveau à la déclaration de guerre en septembre 1939. Après la défaite de la France, il est démobilisé, le 31.07.1940 et rejoint Calvi.

Il est membre du Parti Communiste de puis 1936 et avec ses camarades de la région –son frère Roch, Antoine PERETTI, Jean-Baptiste FREDENUCCI, Paul ALESI et Grégoire TARQUINY – ils ont organisé le Front National localement. Mais que faire sans armes, sans moyens de communication, face à l’occupant italien présent dans l’île de puis le 11 novembre 1942 ? Aussi, quand l’opportunité s’offrira à eux de « faire quelque chose » pour résister, ils le feront. Cette opportunité, c’est la rencontre avec Toussaint GRIFFI et Laurent PREZIOSI du réseau Pearl Harbor, en janvier 1943. Ces deux hommes, accompagnés de deux autres (le cousin Pierre GRIFFI et le chef de mission De Saule), venus d’Alger par le sous-marin Casabianca, ont débarqué clandestinement entre Piana et Cargèse dans la nuit du 13 au 14 décembre 1942. Ces agents cherchent des agents locaux sur qui ils peuvent compter. C’est Hyacinthe MONTERA, l’ancien maire de Bastia, destitué par Vichy, et son fils Jacques André, à la tête d’un petit réseau préexistant, qui les ont mis en relation avec le groupe du Front national de Calvi. C’est ainsi que naîtra le réseau Perdrix, pour la mission Pearl Harbor.

Les deux agents d’Alger sont pris en charge pendant une semaine. Le frère de Dominique, Roch SPINOSI, les occupera même à des travaux agricoles pour ne pas éveiller les soupçons de l’ennemi [1] Ils obtiennent des renseignements sur les défenses de l’occupant : emplacement des canons, nids de mitrailleuses, cantonnements, effectifs, stocks de munitions, points de contrôle, etc. Au surplus, ils recrutent des volontaires : Michel FREDENUCCI, CASANOVA et LEBRAS. Ces derniers les retrouveront plus tard à l’hôtel Bonaparte d’Ile Rousse après être revenus d’Ajaccio avec Jean NICOLI, François CARLI et André GIUSTI. Ils feront ensemble le point sur le développement des réseaux en Balagne et des repérages de terrains de parachutage.

Dénoncés mais prévenus à temps, les frères SPINOSI prennent le maquis le 24 janvier [2]. Ils trouvent refuge chez les bergers (entre autres, André COLOMBANI et les familles ACQUAVIVA) des environs, du Marsulinu à Prezzuna, jusqu’à la vallée du Manso plus au sud vers Galéria. Et les intimidations de l’OVRA à l’encontre de son épouse et de la famille n’y feront rien : ils ne seront jamais arrêtés.

Dominique SPINOSI sera, avec son frère Roch, le responsable de la résistance calvaise (et du Front National de la Résistance) ainsi que du réseau Pearl Harbor (région nord-ouest bien au-delà de la Balagne) jusqu’à la Libération de la Corse le 4 Octobre 1943. Il sera rappelé sous les drapeaux par avis de presse le 25/03/44 et reviendra à Calvi le 16/03/45, après avoir été démobilisé.

Après la guerre, il reprendra son activité professionnelles à l’épicerie d’alimentation générale qui avait été pendant les « années noires », en ces temps de pénurie alimentaire, source d’approvisionnement de la Résistance et qui avait même pourvu éventuellement aux besoins des familles en difficultés. * dont il fera en 1960 un restaurant : le restaurant « Chez Doumé » qui garde encore aujourd’hui ce nom. Il reprendra aussi ses responsabilités politiques calvaises (Il est secrétaire de la section de Calvi du P.C.F.), exercera la fonction de maire-adjoint en 1948  et participera à toutes les luttes contre les expériences nucléaires à l’Argentella, la suppression du réseau ferré de Balagne, et sera le représentant de son parti aux élections législatives et cantonales. Il décédera à 63 ans, le 13 septembre 1973 et ses obsèques se dérouleront à Calvi en présence d’une foule imposante.

Pascale VARENNES-SPINOSI

 

[1] Ils sont quelques  cinq cents soldats italiens cantonnés en Balagne. Plus précisément à Calvi qui fait figure de camp retranché ; ils s’étaient installés au fort Charlet et Vallebois. La caserne Sampiero de la Citadelle était, quant à elle, occupée par les redoutables Chemises noires au nombre de trois cents. Sur la route du bord de mer où aujourd’hui ont été bâtis des résidences et des centres touristiques, les soldats étaient installés dans des tentes militaires.

[2] D’autres n’eurent pas cette chance : Le docteur Joseph CRUDELI, médecin retraité est mort lors de sa détention à 66 ans. Plusieurs autres personnes sont elles aussi arrêtées et/ou déportées : Michel Lucchetti et Pierre Bariani, respectivement 1er et 2ème adjoints au maire, Adolphe Landry, Joseph Fondacci et l’avocat François Luciani.

* En 1960, de ce commerce d’alimentation, il fera un restaurant : »Chez Dumè » qui existe encore aujourd’hui.