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BiographiesEvénements LASSERRE Georges

5 juin 2024

Né le 20/02/1920 à Paris 7ème et décédé le 27/03/1999 à Clamart (Haut de Seine)

Georges Lasserre
Georges Lasserre

Après son cursus à l’Ecole Navale avec apprentissage d’officier sur différents croiseurs, Georges Lasserre est affecté sur le sous-marin Casabianca dont le destin héroïque va le conduire fortuitement sur la terre corse pour y aider la Résistance. C’est le plus gradé des cinq sous-mariniers qui par un concours de circonstance seront obligés d’agir sur place et non en mer durant plusieurs mois. Il va participer avec les agents de la mission Pearl Harbour aux réunions clandestines de résistance, à la 1ère réception importante des armes en Corse dans la baie d’Arone le 6 février 1943, et aux contacts avec le Casabianca et les autorités militaires à Alger.

Jeunesse militaire
Il intègre l’Ecole Navale en 1939 à Brest, dernière promotion à cause de l’invasion des troupes allemandes en France le 10 mai 1940. En octobre 1940, après l’évacuation de l’école navale, dont celle vers Dakar à bord du cuirassé Richelieu, il embarque successivement pour instruction sur plusieurs croiseurs ; le Jean de Vienne, le Colbert, le Dupleix, avant d’être envoyé en novembre 1941 comme officier en Algérie. En mars 1942, il est affecté, à l’âge de 22 ans, comme officier en quatrième, pour un départ en août vers Madagascar sur le sous-marin Casabianca qui entre-temps, en avril, est en réparation à l’Arsenal de Toulon (défection d’une pièce de l’embrayage d’un moteur) jusqu’en octobre. Cependant le débarquement des Alliés en Algérie le 8 novembre 42 déclenche une riposte des troupes allemandes qui occupent la zone libre et souhaitent dès lors s’emparer de la flotte française basée à Toulon. Le commandant du secteur maritime de Toulon, Jean de Laborde, ordonne dans la nuit du 26 au 27 novembre le sabordage de la flotte française avant leur arrivée.

L’engagement militaire dans la résistance à l’ennemi
Lasserre, comme tout l’équipage, approuve le refus de sabordage et le départ en direction des côtes africaines. Le Casabianca réussit à passer le filet sous-marin barrant la sortie du port. Bombardé par la Luftwaffe mais évoluant en submersion, le « Casa » parvient néanmoins à rejoindre Alger. Les avions lancent des mines tenues par des parachutes, mais en vain, le Casabianca avait été démagnétisé la veille.

LES MISSIONS EN CORSE

1/ La participation au transport d’agents secrets en Corse (11-19 décembre 1942). Arrivé à Alger le 30 novembre 42, le commandant Jean L’Herminier et son équipage se mettent au service des Alliés. Le sous-marin quitte Alger le 11 décembre pour la Corse avec à son bord cinq agents : Roger de Saule, Toussaint Griffi, le radio Pierre Griffi, Laurent Preziosi, et l’américain Frédéric Brown. Le Casabianca arrive dans l’anse de Topiti, au nord de Cagèse. Le 13 décembre à minuit, deux matelots, Jean Vigot et Jean Lionnais acheminent, une demi-heure plus tard, sur un youyou, ces agents jusqu’au rivage. Après leur retour à bord, le Casabianca replonge. Il revient le 15 décembre à 23 h. pour poursuivre le débarquement du matériel et du ravitaillement à remettre aux agents qui ont trouvé des volontaires locaux. Sous une forte tempête, Georges Lasserre s’est joint aux deux sous-mariniers précités. Ils atteignent le rivage mais une très forte vague a fait chavirer le youyou avec tout le matériel. L’agent américain, champion de natation, regagne le sous-marin à la nage, malgré les vagues violentes qui s’écrasent sur les rochers et informe de l’incident.
Le Casabianca rejoint Alger sans ses trois marins restés à terre. Dès lors, l’enseigne de vaisseau Georges Lasserre doit suivre les agents dans leur périple pendant que ses deux matelots seront hébergés clandestinement par les résistants de Marignana. Avec de Saule puis Pierre Griffi, Lasserre rejoint Toussaint Griffi et Laurent Preziosi à Corte où ceux-ci ont pris antenne et ont organisé un réseau local avec hébergement. L’enseigne de vaisseau reste à Corte avec le radio Pierre Griffi pendant que les trois autres agents vont à Bastia rencontrer des responsables du 1er réseau de résistance avec l’ancien maire Hyacinthe de Montera. Plus tard, Lasserre et les deux sous-mariniers rejoindront les agents à Bastia puis à Ajaccio.

2/ La première importante livraison d’armes en Corse (5-6 février 1943)

Après concertation avec le réseau du Front national de la résistance d’Ajaccio, ils décident tous ensemble, par l’intermédiaire du radio Pierre Griffi, de solliciter Alger pour un approvisionnement en armes. A Alger, le 1er jour de février 1943, à 20h, le Casabianca repart en mission : destination Cavalaire puis la Corse. Il arrive devant la plage d’Arone. Le commandant sollicite deux sous-mariniers pour accompagner jusqu’au rivage, deux autres nouveaux agents : l’adjudant-chef Michel Bozzi, et le radio Jean Chopitel dit Tintin. Robert Cardot et un autre mécanicien, le quartier-maître Paul Asso, sont choisi parmi les volontaires par l’officier ingénieur, Lucien Kerneur. Ils prennent place le 5 février sur un youyou pour y déposer les deux agents mais une fois encore, le youyou s’ensable. Du sous-marin, l’équipage ne voyant pas de signal de retour par lampe torche au bout de 2h, conclut que leurs deux matelots sont restés avec les agents. Le 6 février, parvenu sur la plage, Georges Lasserre est accueilli par Cardot et Asso au milieu des caisses d’armes. Il regagne, avec l’ensemble des personnes requises pour cette réception, la maisonnette-refuge «A Martinella» où les armes ont été stockées. L’un d’entre eux malencontreusement cogne la crosse de sa mitraillette contre une caisse d’armes. Une rafale passe au-dessus des têtes de Cardot et Asso. Les jours suivants, il participe à la répartition temporaire des stocks d’armes dans trois caches près de la bergerie.
Comme ses quatre matelots, Georges Lasserre va vivre, un mois durant dans le maquis, caché avec les autres à Marignana, dans la bergerie U Solognu de la famille Nesa. Ils n’ont ni faux papiers, ni cartes d’alimentation pour accompagner les agents.

CLANDESTIN AU MAQUIS. 7 Févier-10 mars 1943

Comme ses quatre matelots, Georges Lasserre va vivre, un mois durant dans le maquis, caché avec les autres à Marignana, dans la bergerie U Solognu de la famille Nesa. Ils n’ont ni faux papiers, ni cartes d’alimentation pour accompagner les agents. Dans cette bergerie, avec les autres sous-mariniers et une vingtaine de résistants, il mène la vie des bergers corses et des maquisards : couche sommaire, nourriture frugale constituée principalement de polenta corse et fromages. Un plan de défense du refuge est mis au point. Toutes les possibilités d’attaque de l’ennemi sont étudiées : relevé de tous les chemins d’accès à la bergerie, points avancés de défense, repérage au sommet du mont Rao d’un plateau pouvant servir à d’éventuels parachutages.

RETOUR À ALGER. 10-21 MARS 1943

Comme les autorités d’Alger, en accord avec le chef de la mission Pearl Harbour, ont décidé le rapatriement de deux de ces agents (Toussaint Griffi et Laurent Preziosi) qui ont accompli leur mission (renseignement sur l’ennemi, création, coordination et contact avec les réseaux de résistance), le moment est venu pour Lasserre et ses quatre matelots de se joindre à ce retour. La date de retour par sous-marin est fixée pour la nuit du 7 au 8 mars 1943. Le lieu est rapidement décidé, car c’est celui qui avait été étudié pour le projet d’enlèvement d’un général italien par l’équipe militaire de Jean Nicoli : l’anse de Cannella à quelques kilomètres de Porto Vecchio. Le responsable local Dominique Poli les reçoit mais tout l’équipe doit en définitive attendre durant 3 jours dans un hôte de Solenzara. Paul Cinquini les amène en barque jusqu’au sous-marin.    Parvenus à bord du Casabianca, Lasserre, informe, pour sa part, le pacha, des renseignements précieux qu’ils ont obtenus sur le trafic maritime. Le 21 mars le Casabianca, après de longues opérations de torpillage, accoste dans le port d’Alger pour débarquer les agents et repart sur Oran pour un carénage de deux mois.

LA PARTICIPATION AUX AUTRES MISSIONS SUR LA CORSE.

Après cette révision technique du Casabianca, Lasserre poursuit d’autres missions sur la Corse : le 1er et 2 juillet pour dépôt de 13 tonnes de munitions sur la plage de Saleccia ; le 2 septembre, retour pour aller chercher Arthur Giovoni, attendu à Alger pour faire le point, et aussi y déposer 5 tonnes d’armes à Capo di Fenu près d’Ajaccio ; le 11 septembre 1943, l’équipage doit se serrer dans le submersible pour embarquer 109 fusiliers marins du bataillon de choc français à destination d’Ajaccio, libérée depuis le  9 septembre. Le nombre de passagers est exceptionnellement important mais permet à la résistance corse de bénéficier d’un appui ponctuel non négligeable avant l’arrivée des troupes françaises.

Le 14 septembre, Lasserre quitte Ajaccio pour Alger à bord du Casabianca mais son commandant, L’Herminier, diffère encore son intervention chirurgicale contre son artérite et préfère continuer les missions malgré ses souffrances et l’aggravation de son état. Le 20 septembre 1943, est une journée émouvante. Lasserre reçoit la fourragère comme tous les membres de l’équipage. Le Casabianca reçoit la flamme de la médaille militaire, mais le soir même, Jean l’Herminier entre à l’hôpital militaire d’Alger pour subir l’amputation des deux jambes. Quatorze jours plus tard, le 4 octobre la Corse est libérée.

La fin de la guerre.

Après les missions sur la Corse, sous le commandement du second, Henri Bellet, Lasserre participe à une douzaine de missions effectuées par le Casabianca notamment pour la destruction de navires allemands, ceci jusqu’aux rives de l’Espagne. Le 20 juin 1944 retour à Alger de la dernière mission en Méditerranée. Le sous-marin est envoyé ensuite à Philadelphie (E.U) pour réparation. Lasserre reçoit en octobre 1944 son premier commandement sur le dragueur de mines D322, baptisé plus tard Capucine, l’un des YMS cédés par les Etats Unis et affectés à la 32ème division de dragueurs à Toulon. Il avait quitté le Casa avant son arrêt définitif le 29 septembre 1945 à Toulon où son odyssée se termine auréolée de ses belles pages d’histoire de la Marine française, avec tous les honneurs rendus.

Après la fin de la 2ème guerre mondiale

Promu lieutenant de vaisseau en 1945, il devient successivement notamment par des affectations sur des sous-marins : 1946 officier en second sur le sous-marin Millet, 1948, chef de sécurité sur le croiseur Jeanne d’Arc, 1949 , commandant du sous-marin Astrée, 1952 , commandant en second de la 1ère escadrille de sous-marins à Toulon, en 1953 du sous-marin Artemis, capitaine de corvette en 1954 et affecté à l’école navale comme professeur ASM,  en 1958, présent sur le sous-marin océanique Marsouin. De 1959 à 1960, il effectue des commandements sur des porte-avions et des escorteurs avant d’enseigner à l’Ecole supérieure de guerre navale en qualité de professeur de tactique sous-marine et devient capitaine de frégate. En 1962, il est promu commandant de la 2ème escadrille de sous-marin à Lorient. Entre 1963 et 1965, il est affecté comme commandant en second du porte-hélicoptères La Résolue, école d’application en 1964 (rebaptisé Jeanne d’Arc), puis promu capitaine de vaisseau et rejoint l’état-major de la Marine à Paris comme chef de bureau « sous-marin ». En septembre 1968, au commandement du croiseur antiaérien De Grasse, affecté au centre d’expérimentation du Pacifique (dissuasion nucléaire).

Fin des années 60, il accède aux plus hauts grades de la Marine

Auditeur des Hautes études militaires en 1971, il est promu contre-amiral en 1972 et nommé commandant du sous- marins d’attaque Alsoumat à Lorient. Ensuite, en 1974, il sera commandant de l’ École supérieure de guerre navale à Paris. En 1976, promu vice-amiral et durant 3 ans commandant des forces sous-marines et de la force océanique stratégique coiffant l’ensemble des sous-marins. Il a sous son autorité outre les sous-marins d’attaque, les quatre premiers sous-marins nucléaires lanceurs d’engins : Le Redoutable, Le Terrible, Le Foudroyant, et l’Indomptable. En mars 1978, il est élevé au grade de vice-amiral d’escadre.  Une carrière de plus de 40 ans au service de la marine au cours de laquelle il aura commandé neuf fois dont cinq fois en mer pendant une durée de plus de 15 ans. Il est un des fondateurs de l’arme sous-marine moderne. En 1980, il est vice-amiral d’escadre et placé dans la 2ème section des officiers généraux.

Georges PREZIOSI

Décorations : Commandeur de la légion d’honneur. Grand officier de l’ordre national du mérite. Titulaire de la croix de guerre 39-45, officier de l’ordre du mérite maritime.

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