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Pages d'histoire Le problème du ravitaillement

27 novembre 2019

Le 2 mars 1943 une manifestation dégénère à Corte. La soupe au lait, plat traditionnel du repas du soir n’est plus assurée. Une foule d’environ mille personnes se fait houleuse. Des cris hostiles à l’Administration, des jets de pierres, montrent le sens politique du mouvement. Des « meneurs » pro-gaullistes sont arrêtés. Le maire est suspecté.

Le 17 mars 1943, le Préfet réduit de 50 % la ration de pain à la suite de l’interruption des relations maritimes entre la Corse et le continent depuis trois semaines. Cinq jours après, 200 femmes bastiaises manifestent, suivies des élèves du lycée. Le caractère politique d’une manifestation de 2.000 personnes est mis en avant par l’Administration. 17 patriotes sont arrêtés mais aussi des espions à la solde de l’irrédentisme. L’affaire est assez grave pour que le Préfet lance un appel à la population, dénonçant le blocus anglo-saxon, les spéculateurs du marché noir et ceux « qui travaillent sournoisement à déformer les faits dans l’intérêt d’une propagande politique ».

Cependant, la délibération du Conseil municipal de Bastia du 19 mars dénonçait déjà les déficiences du ravitaillement et notamment le fait qu’on laissât s’avarier les denrées bloquées, réclamant un plan d’ensemble et un personnel compétent.

La participation des élèves de Bastia aux événements des 22, 23 et 24 mars entraîne la suspension des cours. Les parents doivent faire savoir à l’Administration si leurs enfants continuent leurs études. Les Lycées ont manifesté leur mécontentement sur l’insuffisance de la nourriture et affirmé leur solidarité envers 6 camarades punis. Un tract clandestin du Front patriotique des jeunes les félicite et réaffirme le lien entre la pénurie, les traîtres de Vichy et les occupants.

Le torpillage du « Général Bonaparte » le 19 mai 1943 marque à la fois la proximité de la guerre et la précarité des liens et du ravitaillement avec le continent. Plus de 150 morts sont dénombrés dont la femme du Préfet. Les journaux fournissent des détails émouvants du « forfait britannique » et le service funèbre à la mémoire des victimes associe la Mairie d’Ajaccio, la Préfecture, les légionnaires et le groupe « Collaboration ». Une souscription publique est ouverte au profit des victimes et de leurs familles. A la suite du torpillage, l’équipage du « Cap Corse » refuse de partir sans escorte ou à condition de refuser la présence italienne à bord.

Evelyne Torre

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